Une journée entre monts Dore et monts du Cantal
Le soleil matinal nous accompagne sur les grands espaces dédiés au pastoralisme entre Pavin et Egliseneuve-d’Entraigues. Puis la route s’enfonce entre les feuillus et serpente le long de la haute vallée de la Rhue dont elle suit le cours. A partir de Condat, ce sont, sur la droite, les gorges très accidentées de la rivière que nous laisse entrevoir la végétation. A St Amandin nous les quittons pour mettre le cap au sud et arriver à Riom-és-Montagne.
La belle et grande “Place du Monument” bordée d’arbres sous lesquels on peut stationner fait que l’on se sent tout de suite à l’aise dans cette petite ville de 2800 habitants. La pierre du pays souvent apparente, les nombreuses toitures couvertes d’ardoise ou de lauzes massives, les nombreux “chiens assis” qui surmontent les façades nous confirment que nous sommes bien dans le Cantal. La rue des écoles nous amène au pied du clocher de l’église St Georges dont le porche pavé de galets donne accès à une porte très ancienne du 13ème siècle. La nef à trois travées de style roman surprend par sa construction tout en belles pierres apparentes mais aussi par ses piliers de forme carrée qui supportent les voûtes. Au niveau du transept ou débouche la travée unique et profonde qui forme le choeur, on discerne dans la pénombre de curieux chapiteaux dont certains représentent des scènes guerrières. Derrière l’église s’ouvre la place Charles de Gaulle qui donne accès à l’Hôtel de ville magnifiquement fleuri et dont la construction récente respecte en tous points le style général de la ville.
Située près de la route qui conduit à St Etienne de Chomeil, la société fromagère de Riom (groupe Lactalis) s’impose au visiteur par son importance et par le nombre de camions gros porteurs qui fréquentent ses quais d’expédition. Après une première laiterie dans les années 1900, Riom posséda des 1925 les premières caves réfrigérées du Cantal; on y fabriqua même la fameuse “vache qui rit”. Aujourd’hui, grâce aux 180 employés de l’établissement et à un millier d’éleveurs, ce sont 6500 tonnes par an de fromage laitier qui sortent des entrepôts. Aux appellations protégées (AOP) Cantal et Bleu d’auvergne, s’ajoutent le St Nectaire, le Salers et même les Fourmes. Le visiteur n’est pas autorisé à visiter les installations techniques, mais il nous est donné d’apercevoir un des entrepôts d’affinage et de profiter d’une intéressante vidéo qui explique les différences de fabrication des divers fromages. Le magasin de vente nous permet de goûter les excellents produits proposés à des prix corrects. La fête du Bleu d’Auvergne qui a lieu chaque année l’avant dernier week-end d’août maintient et illustre avec son copieux programme d’animations la longue tradition fromagère de Riom.
Situé à 100 mètres de la fromagerie, l’Espace Avèze est beaucoup moins important, mais pas moins intéressant. C’est vers 1928 qu’Emile Refouvelet fait ses premiers essais en vue de la création d’un apéritif à base de gentiane qu’il appellera “Auvergne Gentiane” La marque “Avèze”, crée en 1962, est aujourd’hui la propriété d’Avèze SAS basée à Riom. L’espace de communication ouvert au public est à la fois intéressant et instructif tant par les tableaux explicatifs que les outils et matériels présentés. Voila une plante – la gentiane – qui fait ses premières fleurs à 10 ans et qui peut vivre jusqu’à plus de 50 ans. Considérée comme parasite par les agriculteurs car elle prend la place de l’herbage des vaches, c’est volontiers – mais néanmoins contre rémunération (car un chou est un chou !) – qu’ils autorisent son arrachage de juin à octobre par les “gençanaïres”. Après triage, lavage et essorage des 1500 à 2000 tonnes de racines récoltées, elles sont réduites en “cosettes” et mises à macérer durant 9 mois pour donner les alcoolats aux vertus multiples qui composent l’Avèze. Après avoir vu les fourches du diable utilisées pour extraire les racines, appris que l’on commence à cultiver des champs de gentiane et visionné un belle vidéo, c’est avec plaisir – surtout à l’heure de l’apéritif – qu’on répond à l’invitation à déguster et comparer les diverses variétés d’Avèze.
Entre l’espace Avèze et la fromagerie, se trouve la gare située sur l’ancienne ligne de Bort les Orgues à Neussargues, fermée par la SNCF en 1991. L’association des Chemins de Fer de la Haute Auvergne animée par une poignée de passionnés a repris la plus belle partie de cette ligne et y fait circuler un autorail touristique : le Gentiane Express qui fait l’aller retour jusqu’à Lugarde sur le plateau du Cézallier. Confortablement installés, nous allons, tout au long du parcours et dans une ambiance bon enfant, profiter de commentaires très intéressants sur l’histoire et les ouvrages d’art de cette voie ferrée de montagne, mais aussi sur le relief et les paysages d’estive traversés. Après le long tunnel de Lestempes, nous voici sur le viaduc en courbe de Barajol auprès duquel nous nous arrêterons et au milieu duquel nous nous rendrons à pied pour surplomber de 57 mètres la rivière. Nous imaginons l’activité passée des petites gares de St Amandin et de Lugarde. Ce charmant petit village typique se découvre au cours d’un arrêt de 3/4 d’heure. On peut y admirer la mairie, la maison du bailli, et la très ancienne église puis revenir tranquillement à la gare pour le retour vers Riom.
Le gentiane Express propose aussi plusieurs animations en cours d’année, notamment une démonstration d’arrachage de gentiane, la visite guidée de Lugarde et le train du patrimoine.
La tête remplie de toutes ces découvertes, c’est à regret que nous quittons les odeurs les couleurs et les magnifiques paysages ensoleillés du Cantal pour reprendre la direction de Clermont.