NEUVY sur BARANGEON 21-28 septembre 2024 (1)

par Monique

     Cette fois, c’est un départ en début d’après-midi, nous n’allons pas très loin. Nous prenons l’A75, bien conduits par Luis, et dès que nous quittons l’autoroute, les routes sont toutes droites et bordées de forêts : tous nos trajets du séjour seront dans ce paysage ! C’est le Berry et la Sologne, un territoire très forestier couvert par de grands parcs privés appartenant à des châtelains, à des personnes très riches qui y pratiquent la chasse au gros gibier (éventuellement à courre), et pour un petit parc de 100 ha seulement, aux VVF ! Après notre installation dans le pavillon « Verdun », le directeur nous en donne l’historique. Le lieu a été occupé par un ancien pavillon de chasse (à l’entrée du domaine la maison du garde-chasse est une belle demeure XVI ème), puis il y a eu une briqueterie, et un château acheté par une famille bourgeoise après la Révolution. Les bâtiments actuels datent du XIXème, le domaine a été cédé à deux associations d’Anciens Combattants : la Fondation Maginot et celle des Gueules Cassées qui en ont fait une maison de repos pour blessés de guerre, anciens combattants, veuves de guerre. La Fondation Maginot a encore une maison de retraite proche, et les nombreux pavillons portent le nom de batailles de la guerre de 14-18 (Verdun, Strasbourg, la Marne…). Et puis le domaine a été mis en vente, les habitants des villes alentour craignaient son acquisition par un propriétaire qui en ferait encore une chasse, les VVF ont été contactés et ont relevé le défi. Mais c’est un VVF un peu atypique, c’est un hôtel confortable du XIX ème (chambres sans cuisinette, salle de billard et de jeux de société, grande salle de cinéma, salon, escaliers en bois, ascenseur ancien, paliers vastes, parquets cirés…), qui reçoit moins de visiteurs actifs comme nous, que des séminaires, des colloques, des classes de jeunes qui font le Service National…La forêt a des bâtiments pédagogiques : serre et ferme pédagogique avec quelques animaux, étangs. C’est un refuge de la LPO, un beau lieu de promenade en forêt. Le domaine s’appelle la Grande Garenne.

     Le dimanche, départ le matin pour Nançay, à 4 km ! pour visiter la biscuiterie des Sablés de Nançay. Une boulangerie familiale fait des biscuits depuis trois générations après qu’un fond de tarte a été « raté » par un apprenti : 20 kg de pâte sont transformés et vendus avec succès. En 2008 la mise aux normes a exigé un nouveau bâtiment mais le biscuit reste fait à la main dans l’atelier de production, avec 600 kg de pâte par jour qui donnent 50 000 sablés qui se conservent 6 à 8 mois, bien fermés dans leur emballage. (Après ouverture, 10 à 15 jours, mais on ne dépasse pas ce délai…)

        L’après-midi, nous partons pour Aubigny sur Nere, où le premier adjoint de la ville nous propose une visite historienne, et enthousiaste de sa ville. On attend que se libère la salle des mariages du château devenu mairie, et notre guide nous apprend qu’en 1395, a été signé ici le traité d’Aubigny, premier traité international entre la Suède, la France et l’Ecosse (alliées contre l’Angleterre). L’épée face au château a été plantée pour fêter les 700 ans du traité en 1995. Le château est celui des Stuart depuis le XVIème à l’issue des guerres d’Italie. La ville compte 5600 habitants, c’est une petite cité industrielle et commerçante dont le passé est prestigieux.

     Nous en aurons l’histoire dans la salle des mariages… pour éviter la pluie. La Suède s’est peu engagée dans le traité, mais l’Ecosse lui est restée fidèle et après la défaite d’Azincourt, les écossais remporteront des victoires déterminantes pour la suite de la guerre de 100 ans aux côtés du roi de France (1421). En 1422, Charles VI meurt et Charles VII lui succède, d’abord couronné à Bourges qui devient capitale jusqu’en 1440. Aubigny est une ville royale que Charles VII donne aux Ecossais pour 250 ans, deux Stuart marquent particulièrement la ville, dont Berault qui bataille en Italie avec François Ier. Mais en 1512 un incendie parti du four banal ravage la ville, il faudra trois forêts de bois pour la reconstruire. Les rapports étroits avec l’Ecosse se prolongent jusqu’à Louis XIV. (je passe sur les détails!!)

     Nous partons dans la ville (il pleut toujours…) Les maisons sont en briques avec des colombages, la Nere remplissait le fossé autour des remparts. Il y a encore beaucoup d’amitié avec l’Ecosse, notre guide avise un jeune homme en kilt et lui demande de nous improviser un petit concert de cornemuse dans l’église ! Celle-ci, très grande, a été remaniée du XII ème au XIX ème, l’entrée fut romane puis gothique. La Vierge et le Christ de la chapelle du prieuré, la mise au Tombeau sont du XVI ème, la Piéta, les vitraux du XVII ème. Les caractères architecturaux rappellent ceux du Mont Saint Michel. En1815, un avocat (J.B Leclerc) devenu aveugle y est guéri et devient guérisseur, un pèlerinage se fera ici jusqu’en 1915.

     Nous repartons pour le château de la Verrerie, XV ème, qui appartient à la même famille depuis 200 ans. Il est au bord de la Nere qui y alimente un étang. Il comporte trois corps de bâtiment, un du XV ème, un autre Renaissance (1520-25) et un troisième détruit fin XVII ème, reconstruit au XIX ème. Notre guide nous détaille toutes ses aventures depuis la guerre de ans, la défaite d’Azincourt qui a décapité toute la noblesse française, l’aide des Ecossais (dont la famille des propriétaires actuels sont les successeurs), et la reconquête du royaume par Charles VII. Les propriétaires sont des descendants de Robert Stuart, imprégné par la Renaissance comme François Ier, d’où la décoration à l’italienne. La galerie représente des chevaliers écossais sur des fresques reconstituées au XIX ème. A cette époque, la famille est nombreuse et l’on agrandit le château pour la recevoir. La bibliothèque est à deux étages avec un escalier (et non une échelle), Eugène Melchior de Vogué qui l’a construite était passionné de littérature russe dont il a traduit certains textes. Il est attaché à « la tradition de la noblesse française, essentiellement faite par les services rendus » par devoir (à l’armée), par service (au roi), par courtoisie (aux femmes), par grandeur d’âme (à Dieu).

     Les voitures anciennes qui avaient envahi la cour sont parties, nous pouvons entrer dans la jolie chapelle du XV ème, décorée à la Renaissance.

     Le lundi, c’est la journée Guédelon, où nous allons voir l’avancement des travaux depuis notre visite antérieure (voir le compte-rendu !). Cette fois, les guides ne nous accompagnent pas comme au début de la construction, mais des « chroniqueurs » nous renseignent. La première chroniqueuse nous rappelle l’histoire de l’aventure de ce désir de construire un château du XIII ème siècle avec les techniques de l’époque (mais le respect de la législation du travail d’aujourd’hui). Ce site était parfait : une carrière de pierres, de l’eau, de l’argile, du bois dans une forêt Natura 2000. Il s’agissait de construire un château fort de A à Z, en prenant plus de temps qu’au XIII ème siècle pour retrouver les méthodes, étudier les enluminures de l’époque, faire de l’archéologie expérimentale. On a inventé un Seigneur de Guédelon qui n’est pas très riche mais veut construire un fort-château en 1255. Il aurait obtenu le droit de construire grâce à Blanche de Castille, mais ne doit pas rivaliser avec le château de son suzerain… Le résultat est impressionnant, le château est maintenant presque terminé, tours, pont-levis, chapelle ont belle allure. Autour des remparts, les artisans-compagnons retrouvent les gestes de leurs prédécesseurs et sont toujours disposés à nous les expliquer, carrier, cimentier, charpentier… Dans la cour, le chroniqueur-géomètre nous trace sur le sable toutes les figures qui permettent rosaces et autres formes, et nous initie aux mesures employées. Après le repas, nous profitons de l’absence de pluie (!!) pour parcourir les extérieurs (le moulin, les ateliers de couleurs… au gré de nos choix. Les différents ateliers sont alimentés par les chevaux qui ne cessent pas de traverser les lieux.