Entretien avec Jean BRINGUET
par Jean François
Jean Bringuet (né en 1924), 94 ans.
A fait construire à Ceyrat en 1961.
2ème Président de CBN.
Comment avez-vous été élu comme président ?
J’étais déjà vice-président depuis la création de CBN ; j’ai succédé à André Boucheix pendant 3 ans de 1981 à 1983. Pas plus, car c’est déjà la moitié d’un mandat municipal et en démocratie, il faut du changement. Mais nous n’avons pas fait d’élections ; ça paraissait évident. C’est Hugues Cristina qui m’a remplacé.
Où vous retrouviez-vous ?
Toutes les réunions, les Assemblées Générales se tenaient dans l’ancienne salle des fêtes qui se trouvait en face de la maison Albaret. En dessous, il y avait les douches.
Quelles étaient alors vos activités ?
J’ai poursuivi les activités engagées par André Boucheix, notamment la finition et l’entretien du parcours de santé, mais aussi le nettoyage de l’Artière, le débroussaillage de certains chemins. Pour le parcours de santé, nous avons été soutenus par la Jeune Chambre Économique. Pour le nettoyage de l’Artière, nous avons bénéficié de l’aide de l’association de pêche « La Tiretaine » dont j’ai été le secrétaire pendant 19 ans. C’est une société qui a été fondée en janvier 1913 à Royat. A l’époque, Jean BONDY en était le président (il est d’ailleurs présent sur la photo de 1988 présentée dans le diaporama des 40 ans). La commune avait prêté le tracteur. J’ai pêché dans beaucoup de rivières dont La Monne. J’ai même eu l’occasion de pêcher une écrevisse (avec un ver de terre) dans un trou à côté du Dolmen de Sanson. Je me suis aussi occupé des marches.
Quel a été votre parcours avant votre engagement à CBN ?
Je suis arrivé à Ceyrat en 1962 où ma femme avait été institutrice pendant 3 ans. Auparavant, j’ai été instituteur et secrétaire de Mairie dans plusieurs communes (par exemple à Lamontgie). J’ai passé plus de la moitié de ma carrière dans l’enfance inadaptée.
Aviez-vous une devise ?
« Vivre, c’est prendre des risques » et il m’est arrivé souvent d’en prendre.
Quelle est la randonnée qui a été la plus dure ?
Je fais une différence entre la marche qui se déroule une partie de la journée et la randonnée qui est sur plusieurs jours et comporte des nuits. Ce que j’ai fait de plus dur, ce fut pendant les 4 années (1988-1991) de notre traversée des Pyrénées d’Ouest en Est et, surtout, la partie des Pyrénées ariégeoises.
Y-a-t-il des endroits où vous auriez aimé aller ?
Je regrette de n’avoir jamais gravi l’Aigoual ou le Canigou.
Lorsque nous étions en petit groupe, nous prenions nos voitures (à l’époque, j’avais une Acadiane). Mais souvent, nous utilisions les cars Ameilbonne. D’autres fois, nous avons pris le train « Le Cévenol ». Chamina et la SNCF publiaient un guide d’une quinzaine de randonnées de 2 à 4 jours accessibles à partir des divers arrêts de ce train. C’est ainsi que nous avons été du Cézallier aux Monts Dore à partir de Blesle-La Bourboule, aux Monts du Cantal à partir de Murat ou sur les Monts Lozère à partir de La Bastide Puylaurent-Villefort.
Avez-vous été obligé de dormir à la belle étoile ?
En dehors de la Corse où ça nous est arrivé souvent (en 1981 sur le GR 20), je n’ai couché qu’une fois dehors à Péclet Polset (départ de Pralognan) faute de trouver de la place dans le gîte. Mais parfois, les conditions d’accueil dans certains refuges sont parfois limites : ainsi dans celui du Prat Redoun dans les Pyrénées, où il y avait des centaines de vaches, les duvets étaient raidis par la bouse. C’était loin d’être agréable !
Qu’aimez-vous dans la marche ?
La nature a toujours été une passion chez moi : je m’intéresse énormément à la géologie, aux insectes (dont les papillons), aux oiseaux et aux poissons. Formé par le scoutisme, j’ai toujours pris un grand plaisir à être dehors au milieu des paysages pour profiter de tout ce que notre belle région nous offre. Avec CBN, j’ai trouvé de bonnes conditions pour concilier tout cela. Je me souviens que nous sommes allés à La Chapelle sur Usson où j’ai trouvé des améthystes enrubannées, une autre fois à la mine des Rois de Dallet qui est un gisement de bitume et aux grottes du Clierzou (dans lesquelles j’ai dormi). Je suis toujours guidé par la curiosité, car je pense que c’est la base de la connaissance.
Comment vous y preniez-vous ?
Dés mon retour d’une randonnée, je préparais la suivante. En effet, je suis convaincu que « dans la précipitation, on ne fait que du mauvais travail ». J’organisais les étapes en m’appuyant sur les topos-guides. Notre principe c’était d’avoir un noyau de base auxquelles d’autres personnes venaient s’ajouter. J’ai marché souvent avec Simone Bonnet, Jacques Fonck (qui faisait aussi partie du Club Alpin Français), Maurice Hertz, Claude Grillot, Claude Cellier, Marie Lafenechere, Léon Bec. Nous avons effectué des centaines de randonnées merveilleuses.
Quels conseils pratiques donneriez-vous aux randonneurs actuels ?
En matière d’équipement, on peut tirer de grandes leçons du port du sac à dos. Car il permet d’apprendre à distinguer le superflu et l’inutile du nécessaire et de l’indispensable. Par exemple, pourquoi s’encombrer de fourchette ou d’une brosse à dents ? Une cuillère et un couteau suffisent pour manger et une pomme pour se nettoyer la bouche !
Question chaussures, je n’ai disposé que d’une paire qui a fait toute ma carrière ! Chaque chaussure pesait un kilo. J’en ai amené une lors de l’anniversaire des 40 ans de CBN. L’autre est chez Maurice HERTZ. Quant aux chaussettes, j’en portais toujours 2 paires : l’une en coton et l’autre en laine, l’une sur l’autre (la plus fine d’abord et la laine par dessus). J’emmenais aussi une tente de 1,5 kg au cas où nous aurions été obligés de coucher dehors.
Comment voyez-vous l’augmentation du nombre de marcheurs ?
J’ai un grand plaisir à voir des gens sortir de chez eux. Je pense en effet que « Un homme seul est en mauvaise compagnie ».
Regrettez-vous le temps de ces grandes randonnées ?
Non ! Je les ai arrêtées il y a une dizaine d’années, mais je continue encore pour de courtes marches jusqu’à la croix St Genès par exemple. Je n’ai pas de regrets. Car, comme le dit fort justement Platon : « Celui dont l’âme est heureuse ne ressent pas le poids des ans »
Grand merci Jean BRINGUET d’avoir accepté de me rencontrer à de multiples reprises pour des conversations sur CBN et bien d’autres sujets. Merci pour votre accueil et pour tous ces échanges où la culture, l’humour et votre esprit pétillant ont régné constamment.
Entretiens réalisés lors de rencontres régulières depuis le mois de janvier.