Voyage à Lège-Cap-Ferret (1)
par Monique
Enfin ! On n’osait plus croire à ce voyage, mais ce dimanche 3 octobre, c’est sous une belle averse que nous avons chargé nos bagages. La pluie a cessé au cours du voyage et nous avons bénéficié du beau temps le reste de la semaine. En arrivant, nous nous sommes installés dans des chalets récents, disséminés dans une vaste pinède de telle sorte qu’aucun d’eux n’a de vis-à-vis devant ses baies vitrées : belle performance architecturale, mais après le repas et une soirée de présentation touristique de la région, nous avons été nombreux à avoir du mal à retrouver nos chalets… Il y a eu des rires dans la pinède !
Le lendemain matin, première petite randonnée pour mieux connaître cette forêt des landes de Gascogne, qui couvre un million trois cent mille hectares et s’étend sur trois départements. C’est la plus grande forêt cultivée et exploitée du monde, composée de 80 % de pins maritimes qui font de 30 à 60 m de haut et dont les feuilles sont « persistantes », c’est-à-dire que les aiguilles tombent tout le temps, jonchent le sol et l’acidifie.
Nous sommes dans la commune de Lège-Cap-Ferret, dans le village de Claouey. La commune compte 11 villages, 8000 habitants, qui n’ont vraiment peuplé ce lieu que depuis 1945 : il n’y a pas de maisons anciennes, et beaucoup trop de résidences secondaires. Au bord du bassin, nous voyons les exploitations ostréicoles dont nous saurons tout un peu plus tard ! Si les huîtres étaient déjà consommées et pêchées par les Romains, le début de l’ostréiculture ne date que de 1865, sous l’impulsion de Napoléon III et Eugénie dont le médecin conseille la consommation d’huîtres pour la santé.
Notre guide, Johan, dont nous apprécierons les qualités tout au long du séjour, nous commente savamment la carte IGN du bassin d’Arcachon, ce qui nous permettra de situer toutes nos découvertes : Arcachon, (11 000 habitants), la Teste (38 000), le pays de Buch, au milieu du bassin, l’île aux oiseaux et la passe dangereuse qui ouvre le bassin sur la mer.
L’après-midi, nous partons en car au village de Cap-Ferret, la mer monte, le bassin est à demi rempli et nous allons prendre le bateau « Nicos » pour faire le tour de l’île aux oiseaux.
Nous assistons à un hélitreuillage sur un bateau, sommes tout près d’Arcachon dont nous repérons la basilique, la villa Saint Yves, la queue de la baleine, sculpture qui change de couleur chaque année… Il y a nuages et soleil, si bien que l’eau du bassin change de couleur entre le bleu, le vert, le gris. Sur l’île aux oiseaux (nommée ainsi à cause des oies bernaches qui s’y posent lors des migrations), il reste deux cabanes « tchanquées » sur pilotis. Le retour se fait le long de la presqu’île par le Sud, Piraillan a un port où l’on voit encore des « pinasses », bateaux à fond plat pour pêcher dans les eaux peu profondes du bassin. Johan nous fait la toponymie des villages qui bordent le bassin.
Mardi matin, départ pour Saint-Emilion, cité médiévale qui doit son nom à un moine bénédictin du VIII ème siècle, venu vivre ici en ermite. L’endroit devient un lieu de pèlerinage, le culte se pratique dans les catacombes : nous allons dans la grotte de St Emilion puis dans l’église monolithe, plus grande église souterraine du Moyen-Âge construite par Pierre de Castillon au retour des croisades, à nouveau vouée au culte. Sur ces terrains calcaires proches de la Dordogne, on cultive du vin de puis le II ème siècle, mais le commerce est important avec les Anglais à partie du VIII ème siècle et la ville obtient des privilèges en échange : elle a un maire depuis 1199 ! A la fin de la guerre de 100 ans, le vignoble s’accroît, le territoire entier est maintenant classé à l’Unesco avec 850 Châteaux.
Après le repas au restaurant les Marronniers, petites routes entre les vignes et paysage bien plus vallonné pour rejoindre le château de Montaigne. Ce n’est plus le château de Michel de Montaigne, mais la tour où il se réfugiait pour lire, écrire ou s’isoler de la vie publique (il était maire de Bordeaux) existe toujours et sa « librairie » a les maximes grecques et latines gravées sur les poutres.
Nous allons au Chateau Petit-Mangot où nous sommes reçus par la propriétaire qui nous fait le récit détaillé de la production de son vin, des vendanges à l’élevage. Exposé passionné et passionnant avant une chaleureuse dégustation. Il est trop tard pour passer commande, ce sera fait à partir de Ceyrat et livré à l’ECC ! Et au retour, leçon d’oenologie par Johan et après le repas, belle soirée du « One Johan show » ! Notre guide est chanteur, guitariste, humoriste…
Le mercredi, départ pour le village d’ostréiculteurs de l’Herbe. La marée laisse une bande de sable mouillé qui permet à Johan de sculpter dans le sable la dune du Pilat en nous expliquant sa formation : grand moment pédagogique et drôle, où l’on comprend bien que ce lieu n’est guère propice au peuplement. Mais à la fin du XVIII ème siècle, on commence à planter des pins pour la récolte de la résine et le gemmage. Un tonnelier de la Teste, Jean Lescat, achète des terrains et son fils Léon, ingénieur des Ponts et Chemins de Fer (il a construit des ponts à Alger) revient au pays à 38 ans en 1861. Il achète le territoire vendu aux enchères avec son frère Frédéric et s’installe à l’Herbe où il construit sa « villa algérienne » où il organise une vie commune avec école, église, réservées à sa famille et ses domestiques. Nous allons visiter cette église chrétienne dans le style mauresque, construite en 1885, maintenant dédiée aux marins. La villa algérienne a été rasée, remplacée par un immeuble qui bénéficie encore de son très beau parc.
C’est à la Teste qu’est installé le premier quartier ostréicole à peu près à la même époque, le mieux conservé depuis le milieu du XIX ème siècle. Petites maisons de couleurs vives séparées par de minuscules ruelles fleuries où les gens passaient leur vie entière.
Elles sont encore habitées par des ostréiculteurs et restent très pittoresques. Nous en sortons pour grimper par un large escalier sur une esplanade qui offre une vue magnifique sur le village et le bassin.
L’après-midi, nous partons dans le Médoc, ce grand triangle entre océan et Gironde au Nord de Bordeaux, le long du fleuve est vinicole, c’est le domaine des Graves.
À Margaux, nous nous divisons en deux groupes. L’un va à la chocolaterie de Mademoiselle de Margaux, qui fabrique « les sarments du Médoc » et d’autres spécialités toutes plus délicieuses les unes que les autres et nous goûtons tout cela à l’aveugle : grand moment de devinette et de délices.
On intervertit les groupes, l’autre groupe va déguster le chocolat pendant que le chai de Chateau- Ferrières, exploitation biodynamique, présente son vin haut de gamme, entré dans le classement des grands crûs. Les deux groupes se retrouvent pour la dégustation.